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CNCT : Mission d’information sur la consommation de tabac et le rendement de sa fiscalité pendant le confinement

(08/10/2021)

Mission Woerth : un diagnostic en demi-teinte

Les conclusions de la mission d’information relative à la consommation et la fiscalité du tabac ont été rendues publiques. Pour le Comité national contre le tabagisme, ce rapport confirme les hausses de taxes comme un outil efficace de lutte contre le tabagisme, et atteste de la stabilité des marchés parallèles en France.

Le CNCT partage par ailleurs une partie du diagnostic établi par les auteurs du rapport, notamment sur la nécessité d’une harmonisation fiscale à la hausse sur les produits du tabac en Europe et rappelle que la poursuite de hausses de taxes significatives est indispensable pour réduire la consommation de tabac qui demeure encore très élevée. Cependant, le CNCT regrette que la responsabilité de l’industrie du tabac dans l’organisation des marchés parallèles ne soit pas davantage pointée et qu’un certain nombre de mesures indispensables ne figurent pas dans le rapport. Le CNCT appelle à la vigilance sur les modalités de la mise en œuvre concrète de ces propositions.

Un marché parallèle stable, les hausses répétées de taxes efficaces, et la responsabilité de l’industrie du tabac non soulignée

La mission d’information évalue l’ampleur du marché parallèle de tabac entre 14% et 17% de la consommation française et entre 16% et 20% des volumes de vente. En 2011, une étude publiée par les douanes chiffrait ce même marché parallèle aux alentours de 20% de la consommation nationale.

Ainsi, malgré les hausses de prix significatives appliquées aux produits du tabac, force est de constater que les niveaux de marché parallèle sont restés stables depuis dix ans en valeur relative. En valeur absolue, compte tenu de la baisse générale de la consommation de tabac en France observée depuis quelques années, le marché parallèle est même en diminution.

De ce constat opéré par la mission d’information, on peut tirer deux conclusions. D’abord, ces chiffres confirment les hausses de taxes sur le tabac comme un outil efficace et indispensable aux objectifs de santé publique. Par ailleurs, ces estimations battent en brèche le discours en particulier porté par l’industrie du tabac, laissant croire à une inflation permanente des marchés parallèles du fait des augmentations des taxes. En revanche, la mission ne pointe pas suffisamment la responsabilité de l’industrie dans l’importance des marchés parallèles.

Analyse des recommandations

Si l’ampleur des marchés parallèles reste stable, sa réalité demeure un problème pour les pouvoirs publics. D’abord, les marchés parallèles affaiblissent une partie de l’efficacité des politiques publiques, notamment en zones frontalières. Ensuite, ces pratiques de contournement représentent un manque à gagner fiscal non négligeable pour l’Etat, alors que la consommation de tabac constitue un fardeau économique de premier ordre pour les collectivités.

 

Le rapport d’information propose un certain nombre de recommandations pour lutter contre les marchés parallèles. Parmi les solutions avancées, le CNCT souscrit à trois mesures :

  • Comme les auteurs du rapport, le Comité national contre le tabagisme estime qu’une harmonisation à la hausse de la fiscalité des produits du tabac en Europe est une mesure souhaitable pour la santé publique. Il est indispensable que la révision de la directive européenne sur la fiscalité des produits du tabac conduise à un rattrapage fiscal de la part des autres Etats européens, à commencer par les frontaliers, afin de mettre un terme aux pratiques actuelles de dumping fiscal et sanitaire ;
  • Le Comité national contre le tabagisme souscrit également aux recommandations du rapport quant à la nécessité de renforcer les sanctions visant à dissuader le trafic illégal des produits du tabac, et renforcer la communication sur ces sanctions ;
  • Le Comité national contre le tabagisme soutient également la proposition visant à un alignement européen des seuils d’achats sur ceux appliqués en France, soit 200 cigarettes par personne. À cette recommandation, et dans la perspective d’un renforcement du système de suivi et de traçabilité des produits du tabac, le CNCT ajoute à cette recommandation la nécessité d’instaurer une notion de temporalité dans les limitations d’achats individuels (soit 200 cigarettes par personne tous les 10 jours).

 

Parmi les solutions proposées, le rapport recommande deux mesures, que le CNCT soutient dans leur principe, sous réserve du respect de certaines conditions :

  • Sur la recommandation de créer une plateforme communautaire de notification des achats (proposition n°4). Pour assurer un meilleur contrôle de la chaîne d’approvisionnement, le CNCT recommande plutôt de renforcer l’existant. En particulier, conformément au Protocole de l’OMS pour éliminer le commerce illicite des produits du tabac, il est impératif d’adopter un système de suivi et de traçabilité rigoureusement indépendant de l’industrie du tabac. Il est par ailleurs primordial pour les pouvoirs publics d’utiliser les données du système actuel de suivi et de traçabilité pour renseigner les pratiques de sur-approvisionnement des fabricants de tabac, et permettre des poursuites contre l’industrie du tabac, à l’instar du procès du Royaume-Uni contre British American Tobacco ;
  • Sur la recommandation de créer des comités départementaux de lutte contre le trafic de tabac (proposition n°8). Sur le principe, le CNCT ne s’oppose pas à la mise en place d’outils complémentaires de lutte contre les marchés parallèles. Toutefois, compte tenu du rôle des fabricants dans les marchés parallèles, la mise en place de ces dispositifs doit être conditionnée à l’exclusion systématique de l’industrie du tabac, conformément aux engagements de la France.

 

Enfin, parmi les solutions proposées, deux mesures apparaissent non opportunes, ou potentiellement dangereuses pour la santé publique :

  • Sur la recommandation de construire la trajectoire fiscale des produits du tabac en anticipant les effets réels de cette trajectoire sur l’évolution de la consommation de tabac (proposition n°1). Pour le CNCT, la hausse des taxes significative et continue sur l’ensemble des produits du tabac est un impératif incontournable pour la santé publique, d’autant que son efficacité a déjà été démontrée sur le plan sanitaire et fiscal. Ainsi, la réalité des marchés parallèles ne doit en aucun cas infléchir ou conditionner la politique fiscale de la France sur les produits du tabac ;
  • Sur la recommandation d’interdire l’importation de produits du tabac (proposition n°5). Le CNCT ne se prononce pas sur la faisabilité juridique d’une telle mesure. Dans une optique du contrôle du marché et de la chaîne d’approvisionnement, il est toutefois possible, conformément au Protocole de l’OMS sur le commerce illicite, d’instaurer des quotas d’approvisionnement des marchés, correspondant à la consommation intérieure réelle. Cette mesure permettrait d’empêcher les fabricants de tabac de sur-approvisionner délibérément les marchés frontaliers, principal moteur du commerce transfrontalier ;
  • Sur la recommandation de renforcer les outils d’accompagnement des buralistes (proposition n°11). Dans le cadre du Fonds de transformation, les débitants ont déjà bénéficié d’un fort soutien financier des pouvoirs publics. Par ailleurs, les hausses de taxes, et donc de prix, ont profité aux buralistes dans leur ensemble : la marge revenant au buraliste étant proportionnelle au prix du paquet, les augmentations de ces dernières ont accru considérablement les revenus des débitants de tabac. Enfin, les revenus des buralistes ont également été tirés à la hausse par le développement d’activités hors tabac. Le CNCT recommande de cibler ces aides, en les limitant aux débits justifiant d’une situation économique dégradée, comme certains buralistes frontaliers. Enfin, il est indispensable que ces aides soient également conditionnées à un respect strict de la réglementation, notamment en matière d’interdiction de vente aux mineurs, et d’interdiction de publicité sur le lieu de vente.

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